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19 décembre 2014 5 19 /12 /décembre /2014 22:40

Kilimanjaro is a snow-covered mountain 19,710 feet high, and is said to be the highest mountain in Africa. Its western summit is called the Masai 'Ngàje Ngài', the House of God. Close to the western summit there is the dried and frozen carcass of a leopard. No one has explained what the leopard was seeking at that altitude. 

Ernest Hemingway, The Snows of Kilimanjaro

Départ

14 février 2014, nouveau départ, pour la Tanzanie et le Kilimandjaro. La tempête Orkan est passée en laissant un ciel de traîne sur le Léman et pas de soucis pour les vols.

Session paquetage, est-ce que j'emporte assez de polaires? La météo annonce 62 cm de neige au sommet pour lundi... Les cinq nuits de bivouac risquent d'être fraîches! J'ai vu sur Youtube une vidéo d'ascension par la voie Machame où quand il ne pleuvait pas il neigeait.

J'emballe tout dans le doute, plus les guêtres et le matelas pneumatique, on verra bien la revue de paquetage de dimanche. C'est aussi la première grande sortie pour le nouveau sac à dos Vaude, un peu compliqué. C'est parti, direction Genève, Istanbul et Arusha.

Départ pour le Kilimandjaro

Départ pour le Kilimandjaro

C'est un bon vol de Genève à Istanbul, quelques heures de battement, puis un avion plein pour Kilimandjaro International Airport. Je me réfugie dans le programme cinéma et arrive sans histoires: immigration, bagages, Gaspard m'attend avec un panneau dehors, mais pas trace de Michel le Savoyard qui devait voyager avec moi.

Arusha, jours d'attente

15 février: une douche froide à la lumière de la lampe à pétrole, quelques heures de sommeil et un déjeuner plus tard, Bent et Raymond sont là avec deux vélos, malgré un quiproquo sur l'adresse, Oasis Lodge à Arusha ou à Moshi. Je pars avec Raymond, en roulant à gauche dans les rues d'Arusha, tribunal pénal international du Rwanda, vieille ville, puis on continue avec une grande boucle dans une jolie campagne le long d'une voie de chemin de fer, puis en montant jusqu'à la porte du parc national, et c'est là que ça se gâte. On monte dans les collines de pied du Mont Meru, puis par des pistes de traverse ça monte, ça descend et la chaleur tape.

Les tartines du matin sont digérées depuis longtemps, fringale, coup de barre, chute de pression, je me retrouve à pousser le vélo à la montée et à me concentrer avant les descentes – des fois, à pousser aussi à la descente. Les mains et le derrière protestent vigoureusement contre la tôle ondulée et les cailloux de la piste. Pour me consoler, Raymond assure qu'il fait frais, pas plus de 30°C, et souligne qu'il n'y a presque pas de poussière après l'orage d'hier soir.

Il est passé 16h quand on arrive, je tire la langue, chez Bent pour un « dîner » consistant. Ouf, les chutes de pression et la fringale sont réglées. Il reste à descendre des collines (aïe, les mains et le derrière) par une piste raide à cailloux, puis 12 km le long de la route, heureusement « peu » de trafic samedi soir. On est à l'Oasis Lodge avant la nuit, et je ne suis pas tombé du vélo une seule fois! La douche chaude et le plongeon dans la piscine sont deux bonheurs et avec optimisme j'attaque une bière Kilimanjaro « Refreshes a Tanzanian thirst.

Tour à vélo autour d'Arusha

Tour à vélo autour d'Arusha

La seconde Kilimanjaro aidant (a BIG Tanzanian thirst), je me repenche sur l'itinéraire.

16 février: journée au ralenti avec une grosse pluie du matin qui durera toute la journée et un temps frais. La réceptionniste m'obtient une pile de cartes postales, je fais mon courrier et mes e-mails. Le groupe arrive par morceaux. Je repère Max et Adeline qui ont repéré Greg et Thomas. Pour le dîner, je commande un Kilimandjaro de nachos (montagne de chips tortillas avec crème dessus) « Masai » = avec viande, ils disent pimentée mais ils se vantent.

Prosper le guide et Adam l'assistant guide sont là et le groupe est au complet. Michel le Savoyard voyageait en réalité samedi, du coup il s'est retrouvé tout seul à l'aéroport et n'est arrivé à Arusha que le matin. Il y a encore Max et Adeline déjà vus, Greg, Thomas, Ingrid, Willy et Philippe. Adam nous explique le système, Prosper pèse nos sacs et on va souper.

Au Kilimandjaro par la voie Machame
Au Kilimandjaro par la voie Machame
Au pied du Kilimandjaro

17 février, c'est parti mon kili. Il faudra s'habituer à l'humour d'Adam, joyeusement relayé par Thomas. On charge tout dans le bus et départ pour la montagne par un temps grisouille mais sans pluie. La route est bonne en direction de Moshi, bifurque vers Machame. Les policiers en uniforme blanc et casquette, impeccables, surveillent le trafic. On s'arrête en route pour le plein d'eau, et deux heures après le départ...

Au pied du Kilimandjro
Au pied du Kilimandjro

Au pied du Kilimandjro

Machame Gate en haut d'un raidillon: Karibu! Arrêt organisationnel: signature du registre d'entrée du parc et attente de la préparation des porteurs dans un abri coquet « tourist shelter ». Adam nous présente les deux autres assistants guides Alphayo et Francis.

Une averse avant le départ... J'achète une housse de sac à dos. Une nappe à carreaux et des assiettes surgissent sur la table de l'abri, et le pique-nique est servi, encore avant le départ.

On traîne encore un peu. Pendant ce temps, les porteurs font la queue pour faire peser leurs charges; le règlement est strict. Tout est humide. Selon Adam, on sera encore dans les nuages ce soir.

Kilimandjaro, Machame Gate
Kilimandjaro, Machame Gate
Kilimandjaro, Machame Gate

Kilimandjaro, Machame Gate

De Machame Gate, 1'811 m à Machame Hut, 3'021 m

A 13h enfin, départ pole pole, par une piste en petits lacets puis par un sentier bien aménagé. Les quelques gouttes de pluie de tout à l'heure se sont calmées, il fait bien humide mais ça ne tombe pas. Le sentier n'est pas boueux, il est arrangé avec des petites marches. J'avance en tête avec Francis, on s'arrête souvent, « drink water, go slowly, you are breaking the rules », on se regroupe quand la forêt s'éclaircit. La vue se dégage sur le Kibo là haut au milieu des nuages. Pas de doute, il y a de la neige!

17h15, on arrive à Machame Hut, signe le registre, et quelques minutes plus tard on arrive au camp préparé par les porteurs. Ils nous ont préparé des bassines d'eau chaude pour la toilette, puis nous servent du thé et pop-corn dans la tente mess. L'humidité monte, il fait un peu frais, mais ce n'est pas grave: quand-même 20°C dans la tente.

On enchaîne directement le souper après le thé, puis Prosper et Adam nous contrôlent les pulsations et l'oxygène sanguin et nous servent le briefing du soir. Il y aurait des velléités de soirée mais la guirlande lumineuse sur accus solaires ne tient pas. Au dodo!

Kilimandjaro, camp à Machame Hut
Kilimandjaro, camp à Machame Hut

Kilimandjaro, camp à Machame Hut

De Machame Hut, 3'021 m à Shira Caves, 3'839 m

18 février, en sortant de la tente il y a une vue encourageante sur le Kibo là haut dans les nuages. Rando de luxe: on avait trouvé les tentes montées, on quitte le camp après le déjeuner pendant que le staff démonte tout.

Pole pole, Alphayo devant, on monte sur le crête au-dessus du camp. Tout de suite, la forêt laisse la place à un maquis d'altitude: bruyères géantes, taillis de 2 m avec des grands troncs morts avec mousses pendantes.

Il y a du monde sur ce sentier. Les groupes se suivent, les porteurs remontent la file (keep left) pour aller monter le camp suivant. Arrêts, « drink water » disent Alphayo et Francis. Le sentier monte bien, un bon ascenseur, toujours sur la crête dans les bruyères. Il y a plein de petites fleurs sur le bord du sentier, et peu de boue, mais dès que c'est mouillé les cailloux sont glissants. En tout cas, pas trace de la terrible poussière ni de la chaleur pénible annoncées dans le guide Trailblazer... pas non plus trace des belles vues sur le Kibo et la plaine: les nuages s'épaississent, une couche au-dessous, une couche au-dessus de nous.

Kilimandjaro, montée à Shira Caves
Kilimandjaro, montée à Shira Caves

Kilimandjaro, montée à Shira Caves

Le Shira, lui, veut bien se montrer sur la gauche. Il était bien dégagé le matin, il se bouche peu à peu.

On arrive aux premiers séneçons géants, dendrosenecio kilimanjari ssp cottonii, d'abord des taches vert clair dans les vallons en contrebas de la crête, là où il y a de l'eau, puis plus proches, puis au bord du sentier.

Le sentier s'étire sur la crête vers le haut et vers le bas, par moments c'est la file continue de touristes et de porteurs. Pour notre groupe, il y a neuf touristes, quatre guides, trente-deux porteurs, ça fait un rapport staff / touristes de quatre à un!

Le brouillard s'épaissit comme on vient buter contre une barre rocheuse qu'on suit vers le nord-ouest. On passe des petites grottes, des ruisseaux qui cascadent en travers du chemin. Prosper annonce la pluie, elle arrive juste avant le haut de la barre. Michel, qui a dépassé son altitude de référence, est à la peine. Willy et Ingrid arrivent à leur altitude de référence.

Kilimandjaro, le Shira, les séneçons
Kilimandjaro, le Shira, les séneçons

Kilimandjaro, le Shira, les séneçons

L'arrivée au camp est mouillée, dans le brouillard. Les tentes sont montées, le dîner est tout de suite servi: randonnée de luxe décidément! En plus, c'est bien bon: salade avocat-mangue, et copieux. Pendant la sieste après le dîner, la pluie s'arrête un moment, il y a de beaux effets de nuages sur le camp et le Shira, mais ça ne dure pas. Le brouillard revient, puis le tonnerre, puis l'orage.

Le brouhaha du camp dans le brouillard...

Je fais des recherches botaniques dans le guide Trailblazer, dans la tente sous la pluie, en essayant de faire sécher quelques affaires. Je reconnais helichrysum et gladiolas. Il y a aussi des grands fenouils verts, mais sans odeur.

Les corbeaux du Kilimandjaro, grands, noirs à collier blanc, rôdent partout. Il est recommandé de bien surveiller son sandwich!

L'orage persiste et il fait frais. Alerte! Ça se dégage. Le Kibo sort quelques minutes des nuages, le Shira est tout dégagé. Adam ameute le groupe, on fait une mini-promenade jusqu'à la grotte, on passe à la cabane signer le registre, ça se bouche de nouveau...

On a encore la démonstration du caisson hyperbare, de la bâche de sauvetage, la présentation du staff et la photo de groupe dans la pénombre.

Kilimandjaro, camp de Shira Caves
Kilimandjaro, camp de Shira Caves
Kilimandjaro, camp de Shira Caves

Kilimandjaro, camp de Shira Caves

Pendant le thé, Ingrid est allée faire conversation avec le staff, elle affirme que les guides font ça parce qu'il faut bien, mais ne voient pas l'intérêt de monter sur la montagne. De là on peut déduire le niveau de motivation des porteurs... En tout cas le staff est gentil tout plein.

Je me lance dans une séance toilette avec ma bassine d'eau chaude dans la petite tente « douche ». Elle permet de mettre tout à l'air en se tenant debout, mais le côté pratique s'arrête là. Un moment de nostalgie des hammams au tassili n'Ajjer...

Le frais du soir est très supportable, 15°C dans la tente, mais le brouillard est épais. Francis suggère qu'on peut aller se coucher, parce que ça permet de libérer les porteurs qui surveillent les tentes. Au dodo donc.

De Shira Caves, 3'839 m à Barranco Hut, 3'986 m

Présentée comme ça, cette étape n'a l'air de rien, mais attention, entre deux on monte à 4'600 m.

19 février, une nuit en pointillés, debout avant l'aube avec 6°C dans la tente. Le Kibo sort du noir au-dessus du camp. Le brouhaha démarre doucement, enfle. Le soleil se lève au-dessus du Kibo dégagé et – pas de doute possible – bien enneigé. L'intention de Prosper d'avancer le départ se perd dans la réalité. Finalement on part, en se fondant dans la longue colonne de fourmis qui monte le long de la barre qu'on avait longée hier par le bas, puis le long d'une crête assez monotone, à blocs de lave.

Kilimandjaro, camp de Shira Caves
Kilimandjaro, camp de Shira Caves

Kilimandjaro, camp de Shira Caves

Le Meru se laisse deviner dans la brume derrière, puis se couvre, puis disparaît, Devant, le Kibo s'est coiffé d'un bel âne, et il y a un paquet de nuages en ailes de mouettes au nord. Michel est à la peine mais s'accroche. Ça monte tout doucement. Une autre colonne de fourmis devant à gauche rejoint la nôtre: c'est la voie Shira – Lemosho, ou bien le circuit nord.

Encore une crête et voilà la tente buffet et un pique-nique consistant après que Max ait rendu son porridge matinal. Après la pause, nouveau départ au ralenti, en colonne par un, le terrain est très fragile à côté du sentier. Voilà les premières plaques de neige! Ça monte tout doucement jusqu'au col de Lava Tower, 4'600 m.

La tour se montre par moments à travers le brouillard. Il y a un gros amoncellement de tentes sur le col, et le sentier hardi de Western Breach qui grimpe au sommet depuis là. On s'arrête juste quelques minutes et on part dans la pente, par groupes. Je descends avec Francis, Alphayo, Thomas et Greg. Voici le tonnerre, les nuages qui montent de la vallée; on presse le pas.

Kilimandjaro, Lava Tower
Kilimandjaro, Lava Tower
Kilimandjaro, Lava Tower

Kilimandjaro, Lava Tower

La pluie nous rattrape avant le camp mais ce sont les 200 m entre l'enregistrement à la hutte et la tente mess qui nous laissent trempés. Willy, Ingrid et Philippe sont déjà là avec Adam, secs. Max, Adeline et Michel suivent avec Prosper une demi-heure plus tard, trempés.

Tout le monde a mal au crâne, en plus Philippe est mal tombé et a des soucis de côte. Je m'en tire avec deux aspirines. Ingrid voit plus grand: elle sort sa pharmacie géante du sac de Willy.

La pluie se calme; je remonte au-dessus du camp dessiner des séneçons géants mais à peine installé, tonnerre, grêlons, je cours me mettre à l'abri avant une nouvelle douche. Ce sera des dessins d'après photos... Adam explique le système pour dater les séneçons. C'est simple: 25 ans par touffe.

Thé et pop-corn, la fin de l'après-midi se passe. Une éclaircie au coucher du soleil nous tire dehors pour quelques photos, puis on rentre pour souper et briefing. Greg exprime ses doutes sur la mesure d'oxygène sanguin. En sortant se coucher, surprise, on voit un grand ciel étoilé, les lumières de la plaine en bas, plus un nuage en vue!

Ce camp de Barranco est bruyant et pas très propre. Les gens ne s'écartent pas vraiment des tentes pour faire pipi, la terre a un parfum d'eau usée, les toilettes sont rébarbatives...

Kilimandjaro, camp de Barranco
Kilimandjaro, camp de Barranco

Kilimandjaro, camp de Barranco

De Barranco Hut, 3'986 m à Barafu Hut, 4'662 m

20 février, après une bonne nuit malgré tout, merci Stilnox, il fait 11°C dans la tente mais tout est totalement humide. Au petit matin on est juste au-dessus de la nappe inférieure de nuages, le Kibo est au-dessus de nous. Un peu plus tard, les nuages sont remontés, on est dans la peuffe. C'est un peu lassant.

Barranco Camp, 3'900 m: le Kibo se montre quelques minutes avant le déjeuner. C'est un camp pas très agréable par ce temps pluvieux. Il y a beaucoup de monde, et encore Adam dit qu'on est en petite saison.

Directement après déjeuner, on aborde la falaise « breakfast wall » par un joli sentier qui monte en lacets et en traversée dans les blocs de lave en quittant les séneçons, mais il y a le brouillard... et l'embouteillage! Adam nous sert une théorie fumeuse en bas du mur: il faut rester groupés sans laisser les porteurs se glisser parmi nous. La bonne blague, ça ne tient pas cinq minutes. Il faut un peu embrasser le rocher, lancer quelques pas au-dessus du vide, faire quelques prises de mains mais ce breakfast wall n'a rien de méchant.

Sur le replat en haut du mur, le brouillard s'épaissit, ça commence à bruiner, On ne traîne pas trop: descente dans une vallée avec séneçons et bruyères, il doit y avoir de belles vues quand il fait beau. Tonnerre, la brume s'épaissit. Le groupe progresse à la queue leu leu, au ralenti. Il pleut carrément maintenant, on remonte, puis c'est une descente raide dans les bruyères géantes sur la vallée de Karanga. La remontée sur Karanga Camp est tout aussi raide et sous une pluie battante. Vite, sous la tente mess! Une pensée pour le staff qui nous a monté la tente, qui nous sert le dîner et qui n'est pas très abrité...

Après dîner, pole pole, on repart dans le raidillon et le brouillard pluvieux. Greg puis moi puis Thomas ont du mal avec la doctrine queue leu leu, on décroche en lacets parallèles. Les fleurs se raréfient, tout d'un coup il ne reste que des lichens. Des cairns créatifs apparaissent sur les gros cailloux de part et d'autre du sentier.

Kilimandjaro, de Barranco à Barafu
Kilimandjaro, de Barranco à Barafu
Kilimandjaro, de Barranco à Barafu

Kilimandjaro, de Barranco à Barafu

Kilimandjaro, camp de Barranco
Kilimandjaro, camp de Barranco
Kilimandjaro, camp de Barranco

Kilimandjaro, camp de Barranco

Deux heures et demie au-dessus de Karanga Camp, voilà une barre rocheuse dans le brouillard. Sur la barre on monte à gauche, le camp de Barafu est juste au-dessus. Là on est en échappée, Alphayo, Greg, Thomas et moi, on fait directement les quelques mètres de plus jusqu'à la hutte pour signer le registre. Là haut, dans une belle éclaircie, on a droit à quelques secondes de vue sur le Mawenzi. On redescend au camp, sur une corniche du versant est. Il fait frais, la pluie redémarre, tourne à la neige pendant le thé. Les autres doivent encore aller signer en bravant les intempéries, sauf les filles qui se font représenter. Les filles c'est comme ça. Souper chinois (!) ce soir et à 20h au dodo.

Kilimandjaro, camp de Barafu
Kilimandjaro, camp de Barafu

Kilimandjaro, camp de Barafu

De Barafu Hut, 4'662 m à Uhuru Peak, 5'895 m

21 février, enfin pas tout à fait, c'est la diane à 23h après trois heures couché, peut-être une de sommeil. Les autres n'ont pas plus dormi, les yeux sont petits au déjeuner. A minuit, on part pour le sommet, en file, pole pole. Le serpent des lampes frontales s'étire sur le sentier. Michel est à la peine. Vers 5'200 m on se sépare, je prends le groupe de tête avec Francis, Alphayo, Willy, Ingrid, Thomas et Greg. Francis nous impose un démarrage foudroyant pour doubler un groupe qui nous passait à l'arrêt, puis, sensation nouvelle sur cette montagne, on se retrouve seuls dans la pente. Francis mène un rythme énergique, on serre les dents puis on négocie une réduction et des pauses, d'autant plus que Greg et Ingrid sont fâchés avec leur digestion, et que personne n'a vraiment dormi. Heureusement le terrain est gelé, les graviers sont fermes, ne roulent pas trop sous les pas.

Montée au Kibo
Montée au Kibo
Montée au Kibo

Montée au Kibo

L'aube nous trouve à Stella Point 5'745 m, déjà bien haut. Alphayo sort du thé chaud de son sac, chacun essaie de grignoter ses rations. Il reste quarante-cinq minutes de promenade le long de la crête jusqu'au sommet. Le soleil pointe derrière nous, puis tout à coup fait de très beaux effets de lumière et nuages sur le Mawenzi. Les glaciers Rebmann, Decken et le glacier sud aussi s'étirent dans la lumière rasante. Le sommet n'est pas très spectaculaire: une bosse sur la crête, une pancarte, Uhuru Peak, 5'895 m, on attend notre tour pour les photos de groupe sous la pancarte. Comme Francis commence à nous pousser vers le bas, Max, Adeline et Philippe nous rejoignent avec Adam et Focus, caisson hyperbare sur la tête. On se félicite parmi, on répète la séance photos mais déjà le temps tourne.

Kilimandjaro, le sommet, 5'895 m
Kilimandjaro, le sommet, 5'895 m
Kilimandjaro, le sommet, 5'895 m

Kilimandjaro, le sommet, 5'895 m

De Uhuru Peak, 5'895 m à Mweka Hut, 3'100 m

On a déjà sept heures de montée dans les jambes en attaquant la descente vers Stella Point. On croise des spécimens intéressants de touristes montants: sous assistance respiratoire, avec petits drapeaux etc. Beaucoup de touristes ont un porteur pour leur sac de jour.

Sous Stella Point, Francis embarque le même groupe à toute vitesse dans les couloirs à graviers. Adeline fait un soleil sur la première plaque de glace, vol plané la tête à ras d'un gros caillou, atterrissage sans casse mais avec une grosse frayeur. Je tempère mes ardeurs d'autant plus que pas très frais, et descends doucement tout seul.

Ce qui ressemblait à des fleurs dans les cailloux la nuit, c'était du givre. Il n'y a aucune végétation ici en haut.

En route, je trouve Michel et Prosper qui redescendent de Stella Point, quand-même un beau résultat compte tenu de l'état de Michel.

J'arrive au camp crevé, m'enfile vite dans la tente pour une sieste, mais pas moyen de fermer l'œil plus de dix minutes: un groupe de Thomson Safaris revendique bruyamment notre corniche, les staffs se disputent tout autour de la tente. Je sors, tant qu'à faire. Il n'y a pas vraiment de quoi se disputer; la corniche est juste sous le vent de toilettes très odorantes...

Un aigle de Lammergeyer tourne dans le vallon sous la corniche, à la chasse aux souris Adidas.

Kilimandjaro, du camp de Barafu au sommet
Kilimandjaro, du camp de Barafu au sommet
Kilimandjaro, du camp de Barafu au sommet

Kilimandjaro, du camp de Barafu au sommet

Tout le groupe est réuni pour le dîner, l'air un peu défait pendant que le staff démonte les tentes. On avale quelque-chose sans vraiment faire attention, puis on part pour la deuxième grande descente. Le terrain est tout minéral d'abord, puis tourne à la steppe d'altitude. Il y a des civières à une roue parquées un peu partout dans la pente. Elles ont été approvisionnées en vue de l'afflux de touristes du premier janvier 2000. Même très fatigué, ce moyen de transport ne me fait pas envie.

A Millenium Hut, 3'800 m, il y a une touriste ficelée sur sa civière-brouette. Non, ça ne fait vraiment pas envie.

Au-dessous de Millenium Hut on plonge dans le maquis de bruyères, avec des protéas à fleurs d'artichaut. La descente continue, sans fin, sur une crête dans les bruyères géantes. Quelques derniers séneçons se montrent dans un vallon à gauche.

On commence à connaître: le ciel se couvre, tonne et tout à coup c'est l'averse, heureusement juste avant Mweka Hut. Après une petite cohue dans le local sombre et un dernier effort, voilà les tentes plantées dans la boue sous les bruyères géantes. Philippe traîne derrière, sa côte cassée le fait souffrir.

C'était vraiment une longue journée. Je suis bien fatigué et je ne suis pas le seul. Au souper, tout le groupe a une concentration diminuée pour discuter les pourboires du staff, opération très codifiée. On y arrive quand-même et ouf! Au dodo enfin sous les bruyères qui s'égouttent sur la tente.

Kilimandjaro, de Barafu Hut à Mweka Hut
Kilimandjaro, de Barafu Hut à Mweka Hut
Kilimandjaro, de Barafu Hut à Mweka Hut

Kilimandjaro, de Barafu Hut à Mweka Hut

De Mweka Hut, 3'100 m à Mweka Gate, 1'700 m

22 février, une bonne nuit après cette grosse fatigue. Le staff prend congé sur l'air de « Kilimanjaro – hakuna matata », Prosper en soliste et le staff en chœur.

The Kilimanjaro tip song (voir n'importe quel Youtube Kilimandaro pour l'air)

Kilimanjaro, Kilimanjaro... Kilimanjaro, mlima mrefu sana (Kilimanjaro, la très haute montagne) Na Mawenzi, Na Mawenzi... Na Mawenzi, mlima mrefu sana (et Mawenzi, la très haute montagne) Ewe Nyoka, Ewe Nyoka... Ewe Nyoka, mbona wanizunguka (toi le serpent, pourquoi tu m'entoures) Wanizunguka, Wanizunguka... Wanizunguka, wataka kunila nyama (tu m'entoures, tu veux me manger) Kunila nyama, kunila nyama... Kunila nyama, mlima mrefu sana (tu veux me manger, la très haute montagne)

Enchaîné avec une adaptation de la chanson des Mushrooms:

Jambo, jambo bwana (bonjour, bonjour monsieur) Habari gani (comment ça va) Mzuri sana (très bien) Wageni, mwakaribishwa (étrangers, bienvenue) Kilimanjaro, hakuna matata (au Kilimanjaro il n'y a pas de soucis) Tembea pole pole, hakuna matata (marche plus lentement, il n'y a pas de soucis) Utafika salama, hakuna matata (arrive bien, il n'y a pas de soucis) Kunywa maji mengi, hakuna matata (bois beaucoup d'eau, il n'y a pas de soucis)

Mine de rien, le staff a eu quelques jours plus inconfortables que nous, avec ce temps pourri.

Il reste encore 1'400 m à descendre dans les bruyères puis dans la forêt tropicale, quasiment tout en marches de troncs super-glissants, mais sans ces marches ce serait la gadoue.

Une trouée dans les arbres s'ouvre sur le Kibo... complètement dégagé avec ciel bleu!!!

Une famille de singes Colobus s'agite dans les arbres: grandes queues blanches poilues qui pendent des branches. Le chef « the elder » est bien calé sur la plus grosse branche.

La descente continue, arrive sur une route forestière et arrive à Mweka Gate. Une dernière signature du registre, visite des toilettes propres, le nettoyage des chaussures n'est pas de trop, et une tournée de bières Kilimanjaro « refreshes a Tanzanian thirst / if you cannot climb it, drink it », condition suffisante mais pas nécessaire!

Kilimandjaro, de Mweka Hut à Mwek Gate
Kilimandjaro, de Mweka Hut à Mwek Gate
Kilimandjaro, de Mweka Hut à Mwek Gate
Kilimandjaro, de Mweka Hut à Mwek Gate

Kilimandjaro, de Mweka Hut à Mwek Gate

Retour

La table et la nappe à carreaux sont là une dernière fois pour un pique-nique consistant et détendu. Prosper signe et distribue les diplômes. L'orage gronde mais cette fois-ci on ne sera pas mouillés: au-revoir au staff et en voiture pour Moshi, à travers les collines.

Au Kilimanjaro International Airport Lodge, l'après-midi se passe tranquillement, en commençant par une grande douche chaude dans une salle de bains propre! Les départs se font en ordre dispersé. Willy, Ingrid et Philippe partent pour des extensions safari, Francis et Alphayo rentrent à la maison. Session piscine sur une belle terrasse panoramique, vue sur la piste de l'aéroport, hum, d'accord, mais aussi sur le Kilimandjaro là haut dans les nuages. A la session paquetage, les odeurs de randonneur humide et pas très frais remontent. Au coucher du soleil, le Kibo sort des nuages.

Max, Adeline, Greg et Thomas partent à la nuit pour le retour par KLM. Il ne reste plus que Michel et moi pour le souper, dodo tôt et trois heures de bon sommeil avant de partir pour l'aéroport.

23 février, petits yeux mais cœur vaillant pour l'enregistrement, embarquement et départ, avec une demi-heure d'avance! Un saut de puce sur Mombasa et un plus grand coup d'aile pour Istanbul et Genève.

Kilimandjaro, le retour
Kilimandjaro, le retour
Kilimandjaro, le retour

Kilimandjaro, le retour

And then instead of going on to Arusha they turned left, he evidently figured that they had the gas, and looking down he saw a pink sifting cloud, moving over the ground, and in the air, like the first snow in a blizzard, that comes from nowhere, and he knew the locusts were coming up from the South. Then they began to climb and they were going to the East it seemed, and then it darkened and they were in a storm, the rain so thick it seemed like flying through a waterfall, and then they were out and Compie turned his head and grinned and pointed and there, ahead, all he could see, as wide as all the world, great, high and unbelievably white in the sun, was the top of Kilimanjaro. And then he knew that there was where he was going.

Ernest Hemingway, The Snows of Kilimanjaro

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